La créativité, c’est la recherche de l’insoupçonnable, c’est partir dans l’inconnu. On ne décide pas d’être inventeur, c’est le résultat d’une action ; c’est plus une histoire 
d’attitude que d’aptitude. Par ailleurs, l’inventeur n’est jamais seul, il est toujours entouré d’une équipe de créatifs. Depuis quarante ans, Creaholic s’est définie comme « une société de créatifs sans avenir ». Ni le travail ni le salaire ne sont garantis. Tout comme 
la confiance, l’instabilité est une notion clé dans la création…

Exposé d’Elmar Mock

Gérer des créatifs constitue une véritable quadrature du cercle. Alors que je suis totalement chaotique et incapable de me gérer, je me suis retrouvé à devoir gérer des dizaines de créatifs ingérables, lorsque j’ai fondé et développé Creaholic, une société qui se charge de résoudre des problèmes insolubles pour les entreprises. Voici l’histoire de mon parcours atypique et les méthodes que j’ai progressivement mises au point pour gérer les créatifs et amener Creaholic à déposer 1 000 brevets dans 160 familles de brevets au cours de ses quarante années d’existence.

Devoir avancer alors qu’on est au bord du gouffre

Tout comme Obélix, je suis tombé sans le faire exprès dans le chaudron de potion magique dès mon enfance, qui a d’ailleurs été très complexe. J’étais très indiscipliné, un peu menteur, un peu voleur et je ne supportais pas l’autorité. À l’école, j’étais abonné au bonnet d’âne et régulièrement puni au coin de la classe. Mes notes en français, allemand et anglais étaient catastrophiques. J’ai accompli les neuf années de scolarité en onze ans. J’ai découvert à l’âge de 20 ans que j’étais dyslexique, ce qui explique rétrospectivement mon incapacité à écrire.

Mon père était horloger, ce qui m’a conduit un peu par hasard à fabriquer des montres. J’ai suivi un apprentissage d’horloger mécanicien, puis une formation d’ingénieur horloger mécanicien. Je me suis alors passionné pour la technique et j’ai suivi un mastère spécialisé dans les polymères. J’ai ensuite rejoint la société suisse ETA SA, où j’ai développé, un peu par hasard, la Swatch, qui a connu un succès mondial. Par la suite, j’ai développé chez Tissot la très populaire RockWatch.

Malgré ces deux accomplissements, je ne supportais pas l’organisation et la hiérarchie des sociétés. J’ai décidé, contre toute raison, de les quitter pour me mettre à mon compte. J’ai ainsi créé, sans l’appui de personne, une société qui ne vendrait rien, ne produirait rien, mais qui se chargerait, grâce à sa créativité, de résoudre les problèmes insolubles pour les entreprises. Cette idée de société était un peu folle, c’est pourquoi nous l’avons nommée Creaholic.

Je me suis alors retrouvé au bord du gouffre. J’ignorais tout du fonctionnement d’une société, du management et de la comptabilité. Pour survivre, j’ai dû enseigner les matériaux à l’école des sciences appliquées de Bienne. Au bout de quatre ans, j’ai commencé à embaucher d’anciens élèves, un peu au feeling, puis l’équipe s’est rapidement étoffée pour atteindre un effectif de 30 personnes.

Classifier les créatifs, pour définir et valoriser leur talent

Pour gérer une telle équipe et maintenir la créativité de ses membres, je devais comprendre leur mode de fonctionnement. En cherchant à les classifier, j’ai constaté qu’il y avait trois catégories de créatifs.

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