Le Journal de l'École de Paris - septembre/octobre 2014

Face au monde

septembre/octobre 2014

L'édito de Thomas PARIS

La mondialisation est là. Depuis longtemps, elle est une réalité pour de nombreuses entreprises et organisations. Elle n’a pas débuté hier, elle ne s’achèvera pas demain. Le monde se construit, petit à petit, cahin-caha. Et de nombreux domaines y sont confrontés, ou contribuent à ce processus. La mondialisation est le fait des États, qui se sont dotés d’outils pour construire un monde de la paix, des échanges et du développement. Elle est le fait des entreprises et des marques, qui partent à la conquête du monde, souvent par nécessité. Elle est le fait de l’éducation, qui elle aussi s’adapte au monde et le construit. Le secteur de la communication offre un bon poste d’observation de la manière dont la mondialisation bouleverse les enjeux pour les marques. Gilles Deléris et Denis Gancel ont fondé l’agence W sur ce constat que les entreprises doivent adapter leur manière de construire leurs territoires de marques face à une mondialisation qui se révèle n’être pas aussi standardisatrice qu’on le prétend. Cette construction implique, dans leur vision, d’associer des métiers traditionnellement séparés : la création, le design, l’architecture et le numérique. Somfy est parvenu à gérer et son territoire de marque et son évolution dans une économie mondialisée. Entreprise basée en Haute-Savoie, elle est spécialisée dans l’automatisation des ouvertures et fermetures. Elle distribue aujourd’hui ses produits directement dans soixante pays, et sa marque est plus connue que celle de ses clients, fabricants de stores et de volets roulants. Dans une analyse des raisons de cette réussite, Jean-Philippe Demaël met notamment en avant une culture marketing, le recrutement de collaborateurs surqualifiés et une internationalisation conduite avec le souci de comprendre les spécificités locales de ses territoires d’implantation. Le déploiement du numérique n’est pas étranger au sentiment d’accélération de la mondialisation. La révolution annoncée des cours en ligne traduit d’abord le fait que l’enseignement évolue désormais sur un marché mondial, ce qui fait craindre une domination sans partage de l’anglais. Le débat entre Philippe Durance, Dominique Boullier et Daniel Kaplan permet de mieux saisir les réels enjeux derrière l’engouement en partie retombé autour des MOOC. L’article suggère que ces enjeux prendront sans doute toute leur mesure quand arriveront les MOOC 2.0. Deux organisations singulières, construites pour accompagner la mondialisation, sont mises en avant en clôture de ce numéro. L’OMC constitue une organisation au fonctionnement étrange. Elle ne produit rien, a des ressources limitées, mais joue un rôle important dans la construction de la mondialisation. Son autonomie par rapport aux États, entretenue par une logique de fractionnement et une organisation duale, lui permet de constituer une plateforme de négociations, et de faire avancer des causes qu’elle-même définit. Philippe Silberzahn a étudié comment la CIA échouait dans sa tentative d’éviter les surprises stratégiques, les événements inattendus qui peuvent avoir des conséquences importantes pour les États-Unis. Cet échec, qui a conduit l’agence à rater des événements importants comme les missiles de Cuba ou le 11 septembre, repose sur une vision autocentrée et quantitative, qui ne lui permet pas d’identifier ou d’interpréter certains signaux que des observateurs plus ouverts au monde auraient sans doute pu décoder. Le monde est un beau projet, vieux comme le monde. Nécessité ou source d’opportunités, il est aussi, pour les acteurs qui s’y projettent, un jeu de Meccano complexe. En comprendre les finesses est un enjeu majeur.
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